Impossible de faire de longues recherches sur l’investissement immobilier, sans tomber sur le bouquin de Robert Kiyosaki, Père riche, père pauvre. J’y ai toujours été hermétique, sans vraiment comprendre pourquoi. Puis un jour j’ai décidé de le lire : et comme le disent beaucoup “ça a changé ma vie” (mais pas pour les mêmes raisons).
Dans son ““autobiographie””, Kiyosaki détaille les attitudes financières divergentes de ses deux pères. Il construit un discours autour du mindset et formule son statement passé à la postérité :
Ne jamais acheter sa résidence principale parce que c’est un passif
A cette époque, j’avais rejoins un asset manager. Sauf que je comprenais rien à la finance. En plus des formations internes, je prenais 1 à 2 heures de court par jour via l’Université catholique de Louvain.
Et j’ai compris.
Sous prétexte d’une parabole de développement personnel, Kiyosaki transforme son conflit d’intérêt manifeste (495 $ la formation écrite, 45’000 $ l’accompagnement à l’investissement locatif) en une vérité façonnée par le storytelling. Ses pères qui n’ont jamais existé ne servent qu’à démontrer le bien fondé de son business pendant une centaine de pages. Un peu à la façon des inconnus que tous les politiciens prétendent avoir rencontrés dans le métro, lors qu’ils arrivent dans une matinale.
Kiyosaki, profite de la naïveté de son public et de son désir de confirmation de leurs propres préjugés en utilisant un storytelling ultra-accessible. Et c’est autrement plus intéressant et accrocheur que des théories économiques réelles et admises, mais arides et chiantes.
Le problème, c’est que son bullshit est repris par des nombreux autres formations, aux US mais aussi en France. Et à forcer d’asséner les mêmes propos, les contrevérités deviennent vraies, puis se retrouvent utilisées pour vendre d’autres formations, promettant de vous libérer de la rat race, de vous offrir l’indépendance financière, de vous rendre libre. Autant de notions floues qui flirtent avec des dérives sectaires, et parfois même avec des pratiques illégales. D’autant que, selon l’aveux de plusieurs formateurs français, le taux de gens qui passent vraiment à l’action, c’est à dire à vraiment investir, est inférieur à 5% des acheteurs de formation.
Kiyosaki lui-même a prétendu appliquer ses propres conseils. Pourtant, un procès contre son ancienne associée a révélé que sa fortune provenait principalement de la vente de ses livres, et non d’investissements immobiliers. Encore plus surprenant, sa société, Rich Global LLC, a fait faillite en 2012, laissant une dette de 23,7 millions de dollars à un investisseur, dette qu’il n’a jamais remboursée.
Comme tout arriviste, Kiyosaki s’est tourné vers la bourse, puis les cryptomonnaies, et a échoué dans toutes ses entreprises. Il a prédit un krach pour novembre 2021, une chute du Bitcoin à 1,1k $ en 2022, et un pari sur l’argent en 2020 qui a chuté de 10 %. Tout se révélera faux.
Parce qu’un bon storyteller, n’a jamais fait un bon analyste.