đ„ Aristophil : Manuscrits & Manigances
Quand la respectabilité se fabrique en brochures glacées et plaquettes CGP.
Bonjour,
Pas le temps dâniaiser en cette rentrĂ©e 2025. Alors que certains font tout ce quâils peuvent pour conserver leur bronzage pour Patrimonia, le petit monde parisien gigote dans tous les sens. Deux plateformes de crowdfunding sont en train de boucler leur rachat, dont jâavais dĂ©jĂ parlĂ© ici, tandis quâune autre finalise la sortie dâun de ses fondateurs historiques. Mais si toutes les infos croustillantes de Patrimonia 2024 tournaient autour de Novaxia, et des (trĂšs longues) vacances de Joachim Azan en Espagne, câest un autre gĂ©rant qui devrait ĂȘtre la scredâ vedette du salon au mĂštre carrĂ© plus cher que le triangle dâor.
Parce que si Altixia est toujours Ă vendre, Praemia (ex-Primonial) serait sur le point de fusionner avec Icamap, qui voudrait se dĂ©velopper vers le retail. Bridgepoint aurait dĂ©jĂ validĂ© le principe de lâopĂ©ration. Enfin, par fusion il faut entendre une reprise en main par les Ă©quipes de Guillaume Poitrinal. Une opĂ©ration plutĂŽt cohĂ©rente pour deux gĂ©rants qui ont en commun dâavoir passablement Ă©nervĂ© leurs plus gros clients, et qui permettra Ă Marc Bertrand, aprĂšs La Française, Amundi et Praemia, de se retrouver dans un gĂ©rant Ă la hauteur des performances quâil dĂ©livre. Sauf si, comme (probablement) Laurent FlĂ©chet, il doit quitter lâentreprise. Peut-ĂȘtre quâil reste une place chez BNP Reim.
Mais la newsletter du jour, elle, prend place au tribunal judiciaire de Paris oĂč lâon croise peu de gĂ©rants, et de moins en moins de startups. Ce matin nĂ©anmoins, le CrĂ©dit Agricole y passera une tĂȘte dans lâespoir dâobtenir une transaction dans lâaffaire de CumCum (quelle histoire ça encore...). Et un Ă©tage plus bas dĂ©butera le procĂšs avec le plus gros nombre de parties civiles depuis lâaffaire SFAM (quelle histoire ça encore, encore) : el famoso Aristophil.
Et comme dans ce (long) Ă©dito, comme dans la plupart des histoires quâon raconte ici (ou ailleurs), câest avant tout une histoire de mauvais gĂ©rant qui frĂŽle lâescroquerie (ou la touche, on verra ce que disent les juges) et de distributeurs qui ne voient pas le problĂšme avant quâil ne soit trop tard.
Mais pour une fois, peut-ĂȘtre que les investisseurs retail obtiendront gain de cause.
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âïž Cash & ChĂątiments
Porte de Clichy, ce matin. Au Tribunal judiciaire de Paris, 13ᔠchambre, salle 2.01, l'atmosphÚre a quelque chose d'électrique. Les robes noires slaloment entre des grappes d'épargnants qui tentent de se repérer, badge à la main, dans ce dédale judiciaire. 4'772 personnes se sont constituées parties civiles selon l'ordonnance de renvoi.
Leur prĂ©judice bien rĂ©el rĂŽde dans les couloirs comme il hante leurs vies. Plus de 800M⏠investis ; prĂšs d'1,2G⏠avec intĂ©rĂȘts. Du 8 septembre au 3 octobre 2025, douze audiences, trois semaines. Un marathon judiciaire pour une escroquerie patrimoniale hors norme.
Face aux juges : GĂ©rard LhĂ©ritier, 77 ans, l'homme qui a transformĂ© des manuscrits rares en machine Ă cash. Ce n'Ă©tait pas sa premiĂšre aventure : dans les annĂ©es 1990, il avait dĂ©jĂ montĂ© une sociĂ©tĂ© proposant des placements dans les timbres de Monaco, terminĂ©e en banqueroute. Mis en examen dĂšs mars 2015 aprĂšs la mise en liquidation judiciaire d'Aristophil, il comparaĂźt avec une dizaine d'autres prĂ©venus. Parmi eux, Michel Perronnet, Philippe Samson et Jean-Jacques Itard, les dirigeants du rĂ©seau Finestim, tĂȘtes de pont de la distribution CGP. Un notaire, JĂ©rĂŽme Gautry. Un libraire-antiquaire parisien, Jean-Claude Vrain. Un expert-comptable, Denis Potier. MĂȘme un professeur de droit, Jean-Jacques Daigre, architecte des montages juridiques. Comme si l'arnaque avait eu besoin de toutes les respectabilitĂ©s pour prospĂ©rer.
Les chefs d'accusation tombent comme une litanie administrative : escroquerie en bande organisée, pratiques commerciales trompeuses, et pour certains, abus de biens sociaux. Le procÚs devra déterminer le caractÚre intentionnel de la fraude commise entre 2009 et 2015. Les prévenus encourent jusqu'à 10 ans d'emprisonnement et 1M⏠d'amende chacun.
Mais arrĂȘtons-nous deux secondes.
Parce que ce procĂšs pĂ©nal qui mobilise tout le monde, il arrive aprĂšs la bataille. La chute a commencĂ© par la Belgique : la filiale d'Aristophil y est mise en faillite dĂšs dĂ©cembre 2014 grĂące au commissaire Marc Piron, dĂ©clenchant les perquisitions en France trois mois plus tard. Entre-temps, l'AMF avait dĂ©jĂ tirĂ© la sonnette d'alarme dĂšs 2003, puis en 2012 sur ces « placements atypiques » en lettres et manuscrits, hors pĂ©rimĂštre MiFID : mais la rĂ©gulateur pouvait alerter, pas sanctionner. Et pendant que les milliers de victimes attendaient l'ouverture des dĂ©bats, les tribunaux civils, eux, bossaient. Depuis 2019, mĂ©thodiquement, arrĂȘt aprĂšs arrĂȘt, ils ont construit une jurisprudence qui a mis au ban Aristophil, et mĂȘme redĂ©fini les contours du devoir de conseil.
Mais pour comprendre comment plus de 30'000 épargnants ont pu croire qu'une lettre d'Einstein valait de l'or et qu'un manuscrit de Sade était un placement de bon pÚre de famille, il faut (aussi) regarder ailleurs.
Il faut regarder vers cette armĂ©e de l'ombre. Les tĂȘtes de rĂ©seau CGP figurent parmi les prĂ©venus, mais la grande majoritĂ© des vendeurs de terrain, non. Ces 600 Ă 800 intermĂ©diaires qui ont fait circuler le produit Aristophil restent dĂ©sespĂ©rĂ©ment absents des dĂ©bats pĂ©naux. La justice pĂ©nale ne jugera que la conception et la direction du systĂšme, pas l'exĂ©cution massive de la vente. Du salon feutrĂ© d'un CGP toulousain Ă l'appartement d'un retraitĂ© versaillais, ces conseillers ont portĂ© la bonne parole.
« Tangible, prestigieux, décorrélé », qu'ils disaient.
« 8% par an, présentés comme sans risque », qu'ils promettaient.
C'est là que l'équation devient glaçante. Un schéma de Ponzi soupçonné par l'accusation, mis dans un joli papier coffret cadeau par des professionnels qui auraient dû poser les bonnes questions. Genre : comment un manuscrit peut-il faire l'objet d'une promesse miroir de rachat à +40% en cinq ans quand personne ne l'achÚte ? Ou mieux : qui fixe le prix et qui contrÎle ?
Sans eux, pas d'affaire Aristophil, pour l'essentiel.
đïž Sade Story
L'histoire commence à Nice en 1990. Une SARL qui achÚte et vend des lettres et manuscrits. Trois employés dans des bureaux à Villeneuve-Loubet. Moins de 200 collectionneurs. Confidentiel. Presque artisanal.
Mais GĂ©rard LhĂ©ritier voit plus grand. TrĂšs grand. Les musĂ©es s'ouvrent, rue de Nesle d'abord, puis boulevard Saint-Germain, Ă cĂŽtĂ© de Gallimard. Paris, puis Bruxelles. Le magazine Plume est rachetĂ©. Les Rencontres internationales des lettres et manuscrits rassemblent du beau monde. Finkielkraut, DebrĂ©, Giesbert. Poivre d'Arvor participe mĂȘme Ă la promotion des placements. Le vernis culturel s'Ă©paissit. Publications avec Gallimard. MĂ©cĂ©nat gĂ©nĂ©reux : 2,5M⏠à la BNF pour un manuscrit mĂ©diĂ©val. Christian Estrosi reçoit des mains de LhĂ©ritier un discours de De Gaulle1.
La respectabilité s'achÚte.
La légitimité se construit.
Sur un bureau, une belle brochure glacĂ©e. Einstein en couverture. Ă l'intĂ©rieur, Hugo, De Gaulle, Sade, Proust, CĂ©line, Baudelaire. MĂȘme une lettre Ă quatre mains de Van Gogh et Gauguin2. Les pages tournent. Quatre yeux scrutent les pages. Un CGP et son client Thierry R., un chef d'entreprise qui vient de cĂ©der sa boĂźte. Les mots glissent dans la conversation comme des Ă©vidences. « Tangible. » « Prestigieux. » « Non corrĂ©lĂ© aux marchĂ©s. » Et puis, mine de rien : « 8 Ă 9% par an », parfois plus selon certains tĂ©moignages, prĂ©sentĂ©s comme « sans risque ».
Le client hoche la tĂȘte. AprĂšs tout, c'est Einstein sur la couverture, pas un vulgaire tracker. Le CGP enchaĂźne.
« C'est du réel, monsieur. Pas comme la bourse qui peut s'effondrer demain. Un manuscrit de Sade, ça ne disparaßt pas. »
Le client acquiesce encore. La logique semble imparable. Le ticket d'entrĂ©e ? Entre 10K⏠et 750KâŹ. La moyenne tourne autour de 80KâŹ. Accessible mais consĂ©quent.
Sauf que.
Juridiquement, ce qu'Aristophil vendait, c'Ă©taient des parts en indivision. Des contrats parfois baptisĂ©s Amadeus pour faire plus chic. L'investisseur achetait un droit indivis sur un manuscrit, pas le manuscrit lui-mĂȘme. Avec une option de rachat. Mais attention, option non ferme. Aristophil n'Ă©tait pas tenue de racheter. C'Ă©tait Ă©crit quelque part dans les petites lignes. Les rendements Ă©taient prĂ©sentĂ©s comme garantis dans le discours commercial, mais aucune garantie contractuelle n'existait. Le discours suggĂ©rait une sortie liquide Ă 5-7 ans. La rĂ©alitĂ© ? Aucun marchĂ© secondaire n'existait. IlliquiditĂ© totale.
Prenons l'exemple canonique, celui qu'on retrouve dans toutes les plaquettes. Le manuscrit Einstein-Besso.
54 pages Ă©crites entre juin 1913 et dĂ©but 1914 Ă Zurich. Einstein et son ami Michele Besso, tout deux physiciens, sây demandent si leur thĂ©orie naissante peut expliquer l'anomalie de l'orbite de Mercure. 26 pages de la main d'Einstein, 25 de Besso, 3 rĂ©digĂ©es ensemble. Des corrections, des formules barrĂ©es, des annotations dans les marges. Un vrai brouillon de travail, un des deux seuls manuscrits existants documentant la genĂšse de la relativitĂ© gĂ©nĂ©rale. Si le commun des mortels nây comprend rien, notamment parce quâils ont des Ă©critures de pharmacien dĂ©pressif, câest un pan complet de lâhistoire des sciences qui y est Ă©crit3.
Extrait manuscrit.
Photo : Christieâs
Ce document exceptionnel, conservé par Besso (car Einstein jetait tout), Aristophil l'avait acquis quelques temps auparavant. Dans les documents commerciaux, on le retrouve valorisé à 12M⏠en parts. Avec cette promesse : +40% de valeur en cinq ans.
Spoiler : en novembre 2021, lors de la vente judiciaire organisĂ©e par Christie's et Aguttes aprĂšs la liquidation, ce mĂȘme manuscrit sera adjugĂ© 11,6MâŹ4. Un record mondial pour un manuscrit scientifique, certes. Mais aussi la preuve que la valorisation Aristophil n'Ă©tait pas totalement dĂ©lirante. Sur ce coup-lĂ .
Mais prenons un autre exemple. Les lettres de NapolĂ©on Ă JosĂ©phine. « Je te donne trois baisers... » La romance impĂ©riale. LhĂ©ritier en avait acquis une pour 400K⏠chez Christie's Londres en 20075. Dans les catalogues Aristophil, ces lettres Ă©taient revalorisĂ©es Ă plus d'1,2MâŹ. Aux enchĂšres judiciaires de 2019, trois lettres issues du stock Aristophil partiront pour un total de 513KâŹ6. L'Ă©cart est Ă©tonnant, mais le marchĂ© a parlĂ©, et il ne parlait pas la langue des expertises internes.
La DGCCRF, quand elle s'est penchĂ©e sur le dossier, a mis des chiffres sur ce dĂ©calage : des prix gonflĂ©s de 147% en moyenne par rapport au marchĂ© rĂ©el7. Jusqu'Ă 317% pour certaines collections8. Le diagnostic est cinglant aussi quâil est simple : « Objet unique, estimation difficile. » « IncapacitĂ© des clients Ă vĂ©rifier les Ă©lĂ©ments. » « MĂ©thodologie de valorisation non transparente. » En clair : Aristophil fixait les prix, Aristophil certifiait les prix, Aristophil promettait que ces prix allaient grimper.
La valeur venait du papier. Pas du marché.
De l'estimation interne. Pas d'une transaction réelle.
Le produit Aristophil, c'était ça. Une histoire racontée avec des manuscrits prestigieux en toile de fond. Une valorisation gonflée à l'hélium des expertises internes. Une promesse de rendement déconnectée de toute réalité de marché. Et une sortie présentée comme acquise alors qu'elle n'était garantie nulle part.
Les investisseurs croyaient acheter de l'histoire. Ils achetaient un droit indivis sans liquidité auquel il ne comprenait pas grand chose.
Mais est-ce que les vendeurs, eux, comprenaient ?
đ Courbe aux Fraises
Aristophil se prĂ©sentait comme le sauveur du patrimoine manuscrit français. Dans Plume, magazine rachetĂ© et transformĂ© en outil publicitaire, on martelait la mission noble : valoriser le patrimoine, comprendre et transmettre l'intĂ©rĂȘt de ces trĂ©sors manuscrits. Entre les pages de cette publication dĂ©tournĂ©e, les dispositifs Coralys et Amadeus Ă©taient mis en scĂšne, les promesses de rendement habillĂ©es en storytelling corporate : « sauver de la dispersion », « mobiliser les Ă©nergies », « prĂ©server pour les gĂ©nĂ©rations futures ».
La culture comme caution, l'investissement comme acte citoyen.
Pour diffuser lâĂ©vangile, Aristophil mise tout sur la distribution : CGP, courtiers, CIF, banquiers privĂ©s parfois. Entre 600 et 800 intermĂ©diaires selon les sources, jusqu'Ă 1â200 si on inclut les apporteurs d'affaires. Une armĂ©e commerciale attirĂ©e par un argument massue : des commissions supĂ©rieures Ă 10%, parfois 15% selon une source, avec des pics possibles jusqu'Ă 18% selon les rĂ©seaux. Pour comparaison : une SCPI classique, c'est 6-8% de commission ; une assurance-vie, 3% maximum Ă l'entrĂ©e ; les rĂ©trocommissions sur encours, 0,1 Ă 0,4% par an.
Câest Finestim qui a servi de hub de distribution, mais l'essentiel de la force de vente reste constituĂ© de petites structures locales.
Le systÚme était rodé comme une chaßne d'assemblage :
Achat de lots (enchÚres ou gré à gré) ;
Structuration : indivision + « promesse de vente » non ferme ;
Repricing interne (survalorisation910) + plaquettes luxueuses ;
Distribution via réseau (argumentaires standardisés) ;
Narratif de sortie Ă 5 ans, sans garantie contractuelle.
Dans les cabinets, on distribuait des supports normalisĂ©s et confusant. Comme cette rĂ©fĂ©rences Ă Lloyd's pour rassurer, alors que l'assurance couvrait les Ćuvres physiques, et jamais la valeur financiĂšre ou la liquiditĂ© des parts11. Tout Ă©tait fait pour que le produit ressemble Ă du placement classique. Un placement typique.
Les courtiers disposaient d'argumentaires prĂȘts Ă l'emploi, jusqu'au courrier-type proposant aux prospects de visionner des reportages TF1 pour « dĂ©couvrir la plus grande collection française de manuscrits ». Aristophil sây prĂ©sentait comme « leader europĂ©en », avec vitrines musĂ©ales et partenariats institutionnels Ă l'appui. Le discours mettait aussi en avant la fiscalitĂ©, argument habituel qui vient taper sur une douleur pourtant surestimĂ©e : exonĂ©ration d'ISF pour les Ćuvres d'art, ou encore l'usage du formulaire 2091 qui permettait Ă Aristophil de gĂ©rer directement le prĂ©lĂšvement des taxes.
Et ça a marchĂ©. Pas seulement auprĂšs des fortunĂ©s. Des retraitĂ©s avec 50K⏠d'Ă©conomies. Des chefs de PME qui viennent de vendre. Des professions libĂ©rales en fin de carriĂšre. Si les parts unitaires pouvaient ĂȘtre modestes, les tickets d'investissement totaux montaient souvent Ă cinq chiffres. Aristophil avait dĂ©mocratisĂ© l'investissement dans les manuscrits. Et on peut dire encore aujourdâhui que dĂšs quâun gĂ©rant ou un distributeur veut dĂ©mocratiser, câest rarement mon signe.
C'est là que le civil a tranché méthodiquement depuis 2019. Les tribunaux ont dit ce que beaucoup savaient mais que peu voulaient entendre : les distributeurs ne pouvaient pas ne pas savoir. Trois manquements récurrents ont été maintes fois relevés :
Prix fixés unilatéralement.
Liquidité inexistante.
Profil client jamais documenté.
C'est ce que les tribunaux vont dĂ©monter, arrĂȘt aprĂšs arrĂȘt.
Privas, mai 201912. PremiÚre condamnation d'un courtier et de son assureur RC Pro. Cinq plaignants, 750K⏠d'investissements. Le CGP aurait dû vérifier les valorisations. Il ne l'a pas fait. Indemnisation à 65% du capital investi.
Privas, novembre 2020. Toujours le mĂȘme motif.
Extrait du jugement13
NĂźmes, en appel, 2021-202214. SĂ©rie d'arrĂȘts confirmant les condamnations. Signal fort Ă la profession : la responsabilitĂ© des intermĂ©diaires est engagĂ©e sur le dĂ©faut d'information concernant la liquiditĂ© et les prix fixĂ©s unilatĂ©ralement.
Riom, mai 202415. CGP mandataire d'Aristophil condamné. Due diligence inexistante, aucune vérification du contenu des collections. Perte de chance réévaluée à 75% en appel, confirmant le jugement de Cusset du 23 janvier 2023.
Puy-en-Velay, avril 2024. L'assureur RC Pro du conseiller condamné. Douze investisseurs, 710K⏠d'indemnisations. Perte de chance fixée à 95%. L'assurance professionnelle ne couvre pas l'aveuglement volontaire.
Parmi tant dâautres.
La Cour de cassation pose le cadre dĂ©but 2025, notamment avec l'arrĂȘt du 26 mars16. Elle confirme la ligne.
Dans les dossiers de contentieux, on retrouve des Ă©lĂ©ments accablants. Des mails types promettant « un placement tangible et sĂ©curisĂ© ». Des argumentaires vantant « la dĂ©corrĂ©lation totale avec les marchĂ©s financiers ». Certains conseillers allaient jusqu'Ă prĂ©senter les manuscrits comme « garantis par Lloyd's », confusion entretenue avec l'assurance des Ćuvres physiques. Câest-Ă -dire des arguments commerciaux d'Aristophil, qui ne pouvaient textuellement ĂȘtre Ă©crit sur les documentations officielles, mais qui ont pensĂ©s pour convaincre les clients.
Dâautant que sâil nâest pas aisĂ© de dĂ©couvrir une fraude, les tribunaux ont clairement mis au jour l'absence quasi systĂ©matique de due diligence. Combien dâintermĂ©diaires ont vĂ©rifiĂ© la mĂ©thodologie de valorisation d'Aristophil ? Combien ont cherchĂ© Ă comprendre comment un manuscrit pouvait prendre 40% en cinq ans ? Combien ont posĂ© la question simple : qui rachĂšte, et Ă quel prix ?
Les réponses sont dans les jugements. Presque aucun.
Cela dit, la justice distingue bien ce quâest de la responsabilitĂ© dâun distributeur, et de ne confond pas avec la perte : personne nâest tenu dâoffrir du 8% sans risque. Bordeaux, dans son arrĂȘt du 1er avril 202517, prĂ©cise que « le conseiller n'est pas tenu de sur-informer un client maĂźtrisant normalement la langue française, dĂšs lors que les documents sont clairs. » Le CGP n'a pas obligation de rĂ©sultat. Il ne doit pas garantir le rendement, ni deviner l'effondrement.
Mais il doit démontrer qu'il a fait preuve de vigilance.
đŒïž Exposition Universelle
Boulevard Saint-Germain, dans le septiÚme arrondissement parisien. Le Musée des Lettres et Manuscrits s'installe au 222 en 2010. Quatre ans plus tard, en septembre 2014, le groupe s'offre un nouvel espace d'exposition. L'événement mérite une inauguration en grande pompe. Le 25 septembre, Rachida Dati, maire de l'arrondissement, coupe le ruban devant Gérard Lhéritier et Gonzague Saint Bris à la nouvelle galerie de l'Institut des Lettres et Manuscrits, située rue Gaston-Gallimard. Dans la vitrine centrale de cette nouvelle galerie, le clou du spectacle : le rouleau des 120 Journées de Sodome18.
Trente-trois feuillets de 11 centimĂštres collĂ©s bout Ă bout, 12 mĂštres de long, Ă©crits Ă la Bastille entre le 22 octobre et le 28 novembre 1785, chaque soir entre 19h et 22h. Un chef-d'Ćuvre d'ingĂ©niositĂ© que Sade avait dissimulĂ© entre deux pierres de sa cellule.
L'exposition durera jusqu'en janvier 2015. Enfin, c'était le plan.
Deux mois aprÚs l'inauguration, en novembre 2014, les scellés tombent sur les portes du musée du boulevard Saint-Germain. Perquisitions. Fin de l'histoire. Mais entre-temps, la vitrine aura joué son rÎle : transformer des manuscrits en arguments de vente.
Parce quâAristophil dĂ©tenait environ 130 000 piĂšces ! Un arsenal culturel transformĂ© en machine commerciale. Chaque manuscrit racontait une histoire. Mais surtout, chaque manuscrit servait l'histoire qu'Aristophil voulait raconter.
DÚs lors, le Musée des Lettres et Manuscrits n'était pas qu'un lieu d'exposition. C'était une fabrique de légitimité. Les vitrines blindées, l'éclairage tamisé, les cartels savants transformaient des feuillets en reliques. Le visiteur lambda admirait. L'investisseur potentiel visualisait son placement. Les manuscrits devenaient preuves : preuve de culture, preuve de valeur, preuve de solidité.
Cette fabrique de prestige s'appuyait sur les « coups » mĂ©diatiques de GĂ©rard LhĂ©ritier. Le rouleau des Cent vingt journĂ©es de Sodome de Sade, achetĂ© 7 M⏠selon lui, piĂšce volĂ©e en 1982 et classĂ©e TrĂ©sor national. L'ensemble de neuf manuscrits de Breton, dont le Manifeste du surrĂ©alisme, acquis pour 3,2-3,6 M⏠chez Sotheby's en 2008. Les 313 messages de De Gaulle de Londres, que l'Ătat requalifiera en archives publiques19. MĂȘme sa contribution de 150 000 ⏠au rachat de l'appartement natal de Verlaine Ă Metz participait de cette stratĂ©gie : se poser en mĂ©cĂšne culturel tout en alimentant la machine commerciale.
En 2014, Aristophil pousse la logique plus loin avec le Cercle Aristophil, un systĂšme de fidĂ©litĂ© par paliers20. Pour 20 Ă 100 K⏠d'investissement, accĂšs au musĂ©e, abonnement Ă Plume, dĂźners au restaurant Le Playa Ă Cannes21. Ă partir de 100 KâŹ, invitations au Fouquet's, au Grand Prix de Monaco, au Festival de Cannes. Au-delĂ de 400 KâŹ, croisiĂšres en yacht et dĂ©placements en jet privĂ© Aristophil. La mise en scĂšne culturelle se doublait d'une mise en scĂšne sociale.
MĂȘme technique avec les oeuvres, dont chaque apparition publique renforçait le rĂ©cit. Un manuscrit de Breton exposĂ© ? Sa cote symbolique grimpait dans les plaquettes commerciales. Une lettre de NapolĂ©on sous vitrine ? Son prix dans les catalogues internes s'envolait.
đ CĂ©citĂ© Volontaire
Les alertes existaient pourtant. à l'automne 2009, le chartiste et conservateur Rémi Mathis publie un billet critiquant le mélange musée/commerce autour d'Aristophil. Il le retirera ensuite, évoquant un risque de diffamation22. Le ton est donné.
Mais lâalerte finit par sortir du cercle des conservateurs. Le 31 mars 2011, UFC Que Choisir alerte sur ces Ă©tranges investissements, pointant survalorisations et absence de marchĂ© secondaire. Les professionnels du patrimoine dĂ©noncent en privĂ© la constitution artificielle dâune bulle qui les empĂȘche dâacquĂ©rir pour les collections publiques. Des fonds privĂ©s auparavant dĂ©posĂ©s dans des institutions ont parfois Ă©tĂ© repris par les ayants droit pour ĂȘtre cĂ©dĂ©s, dont des archives de Romain Gary vendues Ă Aristophil. Le Syndicat de la librairie ancienne demande Ă ses membres de « sâabstenir de prĂȘter la main Ă des opĂ©rations purement spĂ©culatives, qui sapent la confiance en notre mĂ©tier. » Mais qui Ă©coute les trouble-fĂȘte quand Einstein sourit depuis les plaquettes commerciales ?
Il faudra attendre le 12 dĂ©cembre 2012 pour que lâAMF publie une mise en garde contre les « placements atypiques », rappelant que « ces offres ne sont pas soumises Ă la rĂ©glementation protectrice des instruments financiers et que les documents commerciaux ne sont pas examinĂ©s par lâAMF ».
Le 6 décembre 2012, l'AMF saisit la DGCCRF qui dresse le 6 février 2014 un procÚs-verbal pour pratiques commerciales trompeuses. Le problÚme ? Ces produits n'entraient pas dans le périmÚtre des instruments financiers. L'AMF peut alerter, pas sanctionner. Une brÚche béante dans le dispositif réglementaire.
Aristophil exploitait cette faille, et il faudra attendre la loi Hamon du 17 mars 2014 pour que le rĂ©gime des biens divers se durcisse : dossier obligatoire Ă l'AMF, enregistrement, publicitĂ© encadrĂ©e. Trop tard pour les 18 000 investisseurs qui avaient dĂ©jĂ placĂ© 850MâŹ.
En janvier 2014, alors que les dĂ©faillances se multiplient, des Ă©changes informels entre administrations tĂ©moignent de l'urgence. Le ministĂšre de la Culture contacte Tracfin. L'Ătat se mobilise enfin, mais la pyramide vacille dĂ©jĂ .
MĂȘme quand la justice frappe, rien ne sâarrĂȘte. Le 20 novembre 2013, le TGI de Paris reconnaĂźt 313 brouillons de De Gaulle comme archives publiques. Aristophil continue. AprĂšs les perquisitions du 18 novembre 2014, la sociĂ©tĂ© ose encore affirmer que lâAMF a « validĂ© son activitĂ© ». Mensonge flagrant. Le 26 novembre, lâAMF dĂ©ment publiquement : elle nâa « ni agréé, ni visĂ©, ni enregistrĂ© » les produits Aristophil. Jusquâau bout, la manipulation.
Les voix critiques existaient. Journalistes spĂ©cialisĂ©s, experts indĂ©pendants, professionnels courageux. Tous pointaient les mĂȘmes failles. Face au signal faible des sachants, la vitrine culturelle fait Ă©cran. Aristophil brandissait ses avocats et sa collection de parrainages ministĂ©riels. Les alertes se heurtaient au musĂ©e boulevard Saint-Germain, aux inaugurations officielles, aux catalogues signĂ©s par des conservateurs reconnus. La respectabilitĂ© comme forteresse.
Câest seulement en juillet 2017 que lâAMF publie ses listes noires sur les biens divers. Le dispositif rĂ©glementaire sâest durci aprĂšs coup.
Mais le balai passe aprĂšs la bataille.
6. La chute â Saisies, liquidation, ventes judiciaires
Le 18 novembre 2014, la brigade financiĂšre entre au MusĂ©e des Lettres et Manuscrits, et perquisition en simultanĂ© le domicile de GĂ©rard LhĂ©ritier23. Dans les locaux d'Aristophil, les enquĂȘteurs dĂ©couvrent l'ampleur du dĂ©sastre. Environ 130 000 piĂšces Ă inventorier, une comptabilitĂ© labyrinthique oĂč, selon les constats des enquĂȘteurs et associations, certains manuscrits apparaissent dans plusieurs indivisions. 105M⏠d'avoirs bancaires saisis, 13M⏠d'immobilier gelĂ©. Lors des perquisitions, les enquĂȘteurs saisissent aussi 155K⏠en liquide dans la villa niçoise de GĂ©rard LhĂ©ritier. Son patrimoine comprend un yacht de 19m Ă©valuĂ© Ă 1,4MâŹ, amarrĂ© Ă un anneau achetĂ© 270KâŹ, ainsi que plusieurs dizaines de millions d'euros en placements financiers gelĂ©s2425.
La machine qui tournait depuis des annĂ©es s'arrĂȘte brutalement.
Au-delĂ des multi-inscriptions, les enquĂȘtes rĂ©vĂšlent des survalorisations massives et des reventes internes opaques. Ces situations ont nourri, cĂŽtĂ© civil, des demandes cumulĂ©es en revendication (restitution/substitution) et en crĂ©ance (perte de chance/prĂ©judice)26.
Pourtant, dans une lettre adressée aux clients le 4 décembre 2014, la direction dénonce une « mise à mort programmée avant tout jugement », affirmant que le blocage des comptes « asphyxie » la société.
Ă partir de lĂ , tout s'enchaĂźne. GĂ©rard Philippot est dĂ©signĂ© administrateur judiciaire le 13 fĂ©vrier 2015. Trois jours plus tard, le 16 fĂ©vrier, le tribunal de commerce de Paris prononce le redressement judiciaire27. Six mois aprĂšs, le 5 aoĂ»t 2015, c'est la liquidation judiciaire28. Le tribunal dĂ©signe Christian Galantaris et JĂ©rĂŽme Cortade comme experts pour Ă©valuer les collections. Les chiffres sont clairs. D'un cĂŽtĂ©, environ 850M⏠collectĂ©s auprĂšs des Ă©pargnants. De l'autre, un passif d'environ 1,2GâŹ. Entre les deux, un trou bĂ©ant.
Le problÚme technique qui se pose alors est vertigineux. Comment liquider des dizaines de milliers de manuscrits dont la trÚs grande majorité est détenue en indivision par des milliers de personnes ? Chaque vente nécessiterait théoriquement l'accord unanime des copropriétaires. Une impossibilité pratique qui menace de bloquer toute redistribution pendant des années.
DÚs l'ouverture des procédures, les souscripteurs se sont retrouvés devant un choix procédural à double entrée :
Revendication : demander la restitution d'un bien confié à Aristophil (ex. lettres achetées en pleine propriété via Amadeus), dans les délais BODACC applicables à l'époque.
DĂ©claration de crĂ©ance : dĂ©clarer une dette due par Aristophil (montant investi, intĂ©rĂȘts promis, frais), pour participer aux rĂ©partitions.
En pratique, beaucoup ont dĂ» faire les deux : revendiquer la chose quand c'Ă©tait dĂ©fendable et dĂ©clarer la crĂ©ance pour couvrir l'Ă©cart de valeur/les pertes. Le tout s'est heurtĂ© Ă deux freins : les scellĂ©s (pas d'accĂšs matĂ©riel aux Ćuvres) et la traçabilitĂ© approximative (inventaire, titres, multi-inscriptions).
Pour les conventions en indivision (notamment Coralys), chaque dossier supposait de réunir les co-indivisaires pour décider :
De sortir en nature (qui récupÚre quoi ? à quelle évaluation ?) ;
De vendre et partager (mais à quel prix sur un marché étroit ?) ;
De rester en indivision (et assumer coûts/garde).
Les absents/non-revendiquants, les désaccords de valorisation et la multiplication des indivisions ont mécaniquement ralenti les flux de restitution.
En juin 2016, une polĂ©mique Ă©clate quand l'administratrice judiciaire Me Monique Legrand confie la gestion des collections Ă Patrimoine Ăcrit, soutenue par la famille LhĂ©ritier et d'anciens courtiers, dĂ©cision qui fait grincer des dents29.
Le 5 octobre 2016, le tribunal de commerce dĂ©signe finalement Aguttes aprĂšs appel d'offres pour gĂ©rer ce casse-tĂȘte : inventorier, conserver et coordonner la dispersion. Un travail de titan : Ă l'arrivĂ©e, environ 6â900 lots seront cataloguĂ©s, 286 mÂł de documents traitĂ©s. Mais le verrou juridique reste fermĂ©.
Il faudra attendre le 16 mars 2017 pour que le TGI de Paris trouve la solution : une ordonnance rendant les ventes possibles, organisant la gouvernance des indivisions et la coordination des ventes sans exiger l'unanimitĂ© impraticable des copropriĂ©taires. Le droit dĂ©verrouille ce que la technique bloquait. Le mĂȘme mois, le notaire d'Aristophil, JĂ©rĂŽme Gautry, est mis en examen pour complicitĂ© de pratiques commerciales frauduleuses30.
Le 20 dĂ©cembre 2017, premiĂšre vente chez Drouot. Mais la veille, l'Ătat annonce le classement TrĂ©sor national du rouleau des Cent vingt journĂ©es de Sodome de Sade et des Manifestes du surrĂ©alisme de Breton. Plus de 900 lots seront revendiquĂ©s ou retirĂ©s au titre d'archives publiques. Ce qui reste part aux enchĂšres. Le manuscrit d'Ursule MirouĂ«t de Balzac atteint 1,17M⏠frais inclus. La lettre d'amour de NapolĂ©on Ă JosĂ©phine, estimĂ©e 60-80KâŹ, monte Ă 280K⏠au marteau. Belle performance ? Sauf que dans les valorisations internes Aristophil, des lettres comparables Ă©taient prĂ©sentĂ©es Ă des niveaux nettement supĂ©rieurs, parfois au-delĂ du million. Division par quatre, au minimum. Total de la vacation : 3,8MâŹ31 et 29% d'invendus.
Avril 2019 marque un jalon intermĂ©diaire. Sous l'enseigne commune OVA (Aguttes, Artcurial, Drouot Estimations et Ader), sept ventes se tiennent Ă Drouot du 1er au 5 avril. Plus de 1 500 lots, pour une estimation globale de 10MâŹ, sont rĂ©partis en thĂ©matiques : Beaux-arts (Renoir, Delacroix, Picasso), LittĂ©rature XIXe-XXe (Rimbaud, Ăluard, Proust), Histoire (NapolĂ©on, Marie-Antoinette, Henri IV, Marat), Histoire postale 1870 (ballons montĂ©s, « boules de Moulins ») et une BibliothĂšque napolĂ©onienne. Parmi les piĂšces phares : un poĂšme de Rimbaud ex-Verlaine (est. 150-200KâŹ), une lettre d'Ăluard (100-150KâŹ), un billet d'amour de NapolĂ©on Ă JosĂ©phine (100-120KâŹ), ou encore des carnets de Delacroix. Depuis la premiĂšre vacation de dĂ©cembre 2017, dĂ©jĂ 14 ventes avaient eu lieu, cumulant 30,6M⏠d'adjudications, dont 47 prĂ©emptions institutionnelles. Un volume notable, mais infime rapportĂ© aux 850M⏠collectĂ©s.
Ce marathon judiciaire durera jusqu'au 16 novembre 2022, date de la 55e et derniÚre vente officielle. Cinq années de vacations réguliÚres, parfois hebdomadaires, principalement à Drouot mais aussi à Neuilly chez Aguttes.
Les piÚces majeures classées Trésor national trouvent finalement preneurs. En 2021, la BnF acquiert le manuscrit de Sade pour 4,55M⏠et les Manifestes de Breton32. Une belle somme, mais qui confirme l'écart entre les fantasmes vendus et la réalité du marché.
Bilan des 55 ventes publiques (2017-2022) : environ 108M⏠de produit brut au total, loin des montants collectés.
Dâautant quâen pratique, le marteau ne va pas directement aux victimes. D'abord les frais de procĂ©dure judiciaire et les mandataires. Puis les frais de garde, conservation et assurance : selon une source impliquĂ©e, un taux de 0,43% HT/an fut appliquĂ© sur les indivisions Ă partir de 2018. Puis arrivent les commissions des maisons de vente. Les honoraires des experts, des avocats. Quand tout le monde s'est servi, le reliquat est maigre.
Reste que les flux internes rĂ©vĂšlent la mĂ©canique rĂ©elle : selon les propres chiffres de la sociĂ©tĂ©, en 2012, environ 2 000 Ćuvres furent revendues pour 46MâŹ, un tiers pour de nouvelles acquisitions, deux tiers pour honorer les paiements au terme. La sociĂ©tĂ© indiquait que 40% des clients demandaient leur argent Ă l'Ă©chĂ©ance et que 15% rĂ©investissaient sous quatre mois. Des chiffres qui, relus aprĂšs coup, confirment la logique de cavalerie.
Et tout ça a Ă©tĂ© permis grĂące Ă un Ă©tonnant concours de circonstance. LhĂ©ritier fut le plus gros gagnant français de lâEuromillions avec 170M⏠en novembre 201233. Entre juillet 2013 et juillet 2014, cela lui permet de rĂ©injecter 31M⏠dans Aristophil pour retarder l'effondrement du systĂšme. De quoi alimenter la machine un temps, mais pas indĂ©finiment.
Et il se trouve que l'affaire Aristophil n'Ă©tait pas un cas isolĂ©. A la mĂȘme pĂ©riode de ventes d'Aristophil, Artecosa dispersait sa collection. Les manuscrits partaient Ă 10-20% du prix payĂ© par les investisseurs.
QualifiĂ©e de « petite cousine d'Aristophil », Artecosa avait Ă©tĂ© fondĂ©e en 2008 par d'anciens salariĂ©s de la maison mĂšre, proposant le mĂȘme type de placements avec des rendements promis supĂ©rieurs Ă 6,25% l'an. « C'est le mĂȘme systĂšme qu'Aristophil, mais en plus intelligent et retors », selon l'Association de dĂ©fense des consommateurs de Lorraine.
Le 13 novembre 2018, la Commission des sanctions de l'AMF sanctionne Artecosa34. Entre 2014 et 2016, 650 clients avaient souscrit pour 25MâŹ, sur des contrats reprenant la mĂ©canique d'Aristophil : indivisions, promesse de rachat Ă +7,5% l'an aprĂšs cinq ans. L'AMF retient des manquements graves : communication trompeuse (expertises prĂ©tendument indĂ©pendantes, fausse "garantie bancaire", expositions prestigieuses jamais organisĂ©es), absence de dĂ©pĂŽt des contrats types, absence d'inventaire et de commissaire aux comptes. Verdict : 10 ans d'interdiction d'exercer comme intermĂ©diaire en biens divers, et 50 000⏠d'amende pour son dirigeant.
Mise en sauvegarde en janvier 2018, ses dirigeants seront condamnés au pénal en juin 2022 à des peines de prison avec sursis et interdiction définitive de gérer.
đšââïž Conseil de guerre
Dans sa lettre du 4 dĂ©cembre 2014 Aristophil dĂ©crivait son schĂ©ma de vente : indivision avec « convention de garde 5 ans » et promesse unilatĂ©rale de vente au bĂ©nĂ©fice d'Aristophil Ă un prix indexĂ© (environ 8% par an), sans obligation pour Aristophil de racheter. La propriĂ©tĂ© (pleine ou en indivision) Ă©tait contractualisĂ©e, Aristophil conservant la garde pendant cinq ans. Une « Ă©tude » interne vantait +12,66% par an en intĂ©rĂȘts composĂ©s sur les enchĂšres. La commercialisation Ă©tait sous-traitĂ©e Ă des rĂ©seaux, notamment Finestim et Art Courtage, liquidĂ©s depuis.
DerriÚre les procédures, des victimes prennent la parole publiquement. Comme Thierry Ehrhardt, chef d'entreprise messin, qui avait placé 20 000 euros pour financer les études de sa fille35. Il n'a récupéré que 4 000 euros aprÚs avoir attaqué son courtier. « J'ai tiré un trait, dit-il. Je pense surtout à ceux qui ont tout perdu. » Son témoignage rejoint celui de milliers d'autres épargnants grugés, souvent silencieux par honte.
Les associations ont joué un rÎle central. L'ADC France, menée par Guy Grandgirard, regroupe prÚs de 800 victimes. Grandgirard fut l'un des premiers lanceurs d'alerte, dénonçant dÚs 2008 la mécanique des indivisions et le rÎle pivot du notaire JérÎme Gautry, rédacteur de nombreuses conventions (prÚs de 60).
Etonnement, la plupart des quelques dizaines de décisions ont concernés des CGP. Les actions contre des banques ont été souvent déclarées irrecevables (monopole du liquidateur) et/ou prescrites
Mais de cette masse de dĂ©cisions Ă©merge quand mĂȘme 4 grands axes, qui certes existent globalement dans la rĂ©glementation, mais qui mĂ©ritent quâon sây attarde :
Valorisation documentée. Les juges demandent des vérifications indépendantes et documentées : sources, comparables, liquidité. S'appuyer uniquement sur la plaquette commerciale a été jugé fautif. à Privas en 2019, le tribunal évoque une « image faussement séduisante ». L'« étude » d'Aristophil affichant +12,66% par an contraste avec les prix réellement obtenus.
Adéquation au profil. Lettre de mission, note d'adéquation, simulations de scénarios défavorables : les cours sanctionnent une allocation disproportionnée et l'inadaptation au profil (ùge, horizon, tolérance à l'illiquidité). Nßmes 2021 et Nancy 2024 l'ont rappelé avec force.
Avertissement explicite. Les mentions Ă©crites sur l'illiquiditĂ©, l'absence de marchĂ© secondaire organisĂ©, le risque de dĂ©cote massive doivent ĂȘtre claires, datĂ©es, signĂ©es. Le discours « 8 Ă 9% sans risque » prĂ©sent dans la communication n'a jamais Ă©tĂ© rectifiĂ© dans les documents remis. Toulouse 2024 sanctionne le CGP qui ne prouve pas une information claire.
Traçabilité intégrale. KYC complet, comptes-rendus de rendez-vous datés et signés, justificatifs de commissions, conservation de tous les échanges. Plusieurs décisions exigent que le professionnel rapporte la preuve (lettre de mission, adéquation, mises en garde). La charge de la preuve pÚse sur lui.
Cette grille transforme chaque dossier Aristophil en cas d'école. Les distributeurs qui avaient conservé leurs documents, formalisé leurs avertissements, limité les expositions ont vu leur responsabilité atténuée. Les autres se retrouvent aujourd'hui face à des condamnations pouvant atteindre plusieurs centaines de milliers d'euros selon l'exposition et la RC pro.
Dommage que la rÚgle ne soit pas venue des associations professionnelles. Elle a été gravée par les tribunaux, condamnation aprÚs condamnation.
âïž Destination Finale
Du 8 septembre au 3 octobre 2025, douze audiences vont donc avoir lieu pour départager les responsabilités, et 5 questions techniques vont structurer ces trois semaines de débats.
La qualification juridique d'abord : escroquerie en bande organisée impliquant une intention délibérée, ou simples pratiques commerciales trompeuses relevant d'une dérive progressive ? La distinction détermine les peines, jusqu'à dix ans pour la premiÚre, mais surtout établit le degré d'organisation de la fraude.
La gouvernance des valorisations ensuite. Comment un manuscrit acheté 500k⏠pouvait-il générer des parts vendues 12M⏠? Le procÚs-verbal de renvoi évoque des gonflements moyens de 147%, avec des pointes à 317%. Qui validait ces expertises, selon quelle méthodologie ? Les prévenus invoquent la complexité d'évaluer des biens uniques. L'accusation y voit un systÚme organisé.
TroisiĂšme nĆud : la promesse de sortie. Les brochures parlaient de « 8 Ă 9% par an », d'un horizon « 5 Ă 7 ans », d'une « liquiditĂ© organisĂ©e ». Aristophil proposait une option de rachat prĂ©sentĂ©e comme quasi automatique dans le discours commercial, mais juridiquement non contraignante. Les enregistrements d'entretiens, les mails, les tĂ©moignages viendront Ă©clairer ce dĂ©calage entre le discours et le droit.
Le rÎle des intermédiaires présents à la barre constitue le quatriÚme point. Le procÚs n'examine pas les 600 à 800 personnes qui ont distribué les produits. Il juge les responsabilités des dirigeants de réseaux : savaient-ils la réalité derriÚre les valorisations ? Les commissions seront évidemment scrutées comme élément d'intentionnalité.
Enfin, la traçabilité interne. Les mails entre dirigeants, les comptes-rendus de comités, les contrats avec les apporteurs d'affaires : chaque document sera analysé pour établir qui savait quoi et quand. L'accusation cherche la preuve d'une connaissance précoce du caractÚre insoutenable du modÚle. La défense plaidera sans doute la bonne foi.
CÎté calendrier, le procÚs aura lieu en 3 temps.
PremiÚre semaine : lecture de l'ordonnance de renvoi, qualification juridique, auditions des parties civiles représentatives.
DeuxiÚme semaine : expertises sur les valorisations, analyse de la chaßne de distribution, décryptage des montages.
TroisiÚme et quatriÚme semaines : plaidoiries, réquisitions, délibéré.
Mais ce que le pĂ©nal ne jugera pas mĂ©rite d'ĂȘtre notĂ© Ă©galement.
La redistribution aux victimes, ces 7 à 8% récupérés en moyenne aprÚs les ventes aux enchÚres, relÚve de la liquidation judiciaire, procédure distincte. Globalement les pertes sont acquises.
Le standard professionnel des CGP Ă©galement, a lui Ă©tĂ© fixĂ© par les juridictions civiles quâon a vu avant : la dizaine d'arrĂȘts depuis 2019 a Ă©tabli les manquements, que le pĂ©nal ne modifiera pas.
Enfin, la valeur culturelle et intrinsĂšque des Ćuvres restera hors dĂ©bat. Le tribunal examine des mĂ©caniques financiĂšres, pas de la critique littĂ©raire, mĂȘme si ce sont des pans entiers de notre Histoire qui sont au coeur du dĂ©bat.
Reste que pour tous les professionnels du patrimoine, et plus largement de lâĂ©pargne, les enseignements dĂ©passent le cas Aristophil. Les standards se sont durcis sous la pression du rĂ©gulateur, de la jurisprudence civile et de l'autorĂ©gulation professionnelle.
La valorisation des actifs alternatifs exige désormais deux ou trois avis indépendants minimum, avec des méthodologies transparentes et comparables récents. Les écarts supérieurs à 30% déclenchent des alertes. Si le marché est trop étroit pour fournir des références fiables, c'est un signal sur la liquidité, pas une excuse pour inventer des prix.
Le mĂȘme problĂšme de pose dâailleurs pour les SCPI, entre autres fonds immobiliers. Depuis bientĂŽt 3 ans, plusieurs gĂ©rants se battent avec leurs Ă©valuateurs pour obtenir des prix qui, certes doivent rester cohĂ©rents, permettent de ne pas massacrer les valos des fonds. Le tout par des Ă©valuateurs qui ne foutent jamais un panard dans les actifs, et se contentent de croiser quelques lignes Excel.
Mieux (pire ?). Jâai rĂ©cemment vu un fonds utiliser comme mĂ©thode de valorisation, non pas les actifs sous-jacents (pourtant majoritairement cotĂ©s), mais le prix des transactions, quâil dĂ©cide donc lui-mĂȘme auprĂšs de ses clients (Ă qui il distribue sans passeport, mais bon ça sera lâobjet dâune newsletter dĂ©diĂ©e).
Quant Ă la liquiditĂ© avancĂ©e par Aristophil, et qui a Ă©tĂ© lâun des gros arguments commerciaux, on sait encore aujourdâhui que câest problĂ©matique. Depuis quelques annĂ©es, de nombreux acteurs du non cĂŽtĂ©, notamment immobilier via la tokenisation et private equity via le crowdfuding, promettent une liquiditĂ© via un marchĂ© secondaire (plus ou moins rĂ©glementaire, dâailleurs) quâils ne maitrisent pourtant pas. Parce que non, tokeniser un bien et le coller sur une blockchain ne prĂ©sume pas du fait que quelquâun va vouloir le racheter.
Plus largement, si le cadre rĂ©glementaire des biens divers a Ă©tĂ© renforcĂ© par la loi Hamon de 2014, on voit de plus en plus dâactifs exotiques (montres, cartes PokĂ©mon et jâen passe) proposĂ©s aux investisseurs retails, souvent les plus fragiles dâailleurs, utilisant des discours parfois carrĂ©ment mensongers. Certes, cela concerne peu les distributeurs. Mais cela interroge Ă©galement sur lâadĂ©quation au profil. Combien de KYC voit-on oĂč il suffit de dire « OK » comme « Avez-vous 18 ans » sur un site porno, avec un avertissement sur une surexposition ?
Enfin, Ă©videmment, il y a lâĂ©ternelle question des conflits dâintĂ©rĂȘts.
RĂ©cemment, un CGP mâexpliquait que sâil nâĂ©tait pas payĂ© en rĂ©tro mais en honoraires, alors il nâaurait plus de clients. Câest prĂ©cisĂ©ment le problĂšme.
De la mĂȘme maniĂšre que les agents immos peinent Ă justifier leurs honoraires autrement quâen parlant de leurs charges, nombres dâintermĂ©diaires nâarrivent pas Ă expliquer pourquoi leur conseil Ă de la valeur.
Et lâune des raisons est simple : câest quâil nâen a pas.
Non pas parce que les CGP sont nuls et quâils sont pas foutus de faire une allocâ correcte, mais parce que lâimmense majoritĂ© des clients de CGP (ou dâintermĂ©diaire)⊠nâen ont pas besoin.
Imaginez un monde oĂč vous seriez obligĂ©s de payer un agent immo pour quâil commercialiser votre bien. Combien de clients accepteraient de filer 1000, 3000, 5000⏠? Probablement trĂšs peu. Mais ça Ă©loignerait les touristes, aussi bien les clients que les agents. Et ça redonnerait de la valeur au mĂ©tier.
De mĂȘme, si un conseil ne peut pas ĂȘtre valorisĂ© quelques centaines ou milliers dâeuros, câest probablement quâil nâest pas utile. Parce que personne nâa besoin dâun CGP pour dĂ©terminer une alloc sur 100KâŹ, pour mettre 200⏠/ mois sur une assurance vie, ou choisir entre Remake et Iroko.
Lâexpertise est Ă un niveau tout autre.
A travers les bilans patrimoniaux gratuits et les rĂ©tros rarement comprises par les clients, 95% des CGP36 se positionnent eux-mĂȘme dans un conflit dâintĂ©rĂȘt permanent. Certes, tous les CGP non indĂ©pendant ne sont pas nuls. Mais soyons rĂ©alistes. Avec des produits trĂšs rĂ©munĂ©rateurs comme la SCPI, le feu Pinel ou Aristophil, qui demandent trĂšs peu de travail (Ă lâinverse de monter un investissement locatif de toutes piĂšces), comment encourage un minimum dâalignement des intĂ©rĂȘts.
Cela dit, soyons raisonnables. Le procĂšs Aristophil est avant tout celui des dirigeants et de ceux qui les ont couvert. Les CGP ne sont pas responsables de l'escroquerie elle-mĂȘme : ils n'ont pas conçu le systĂšme, ni falsifiĂ© les valorisations.
Mais ils ont diffusĂ© le discours, sans trop lâinterroger. De mĂȘme que nombreux sont ceux encore, qui diffusent le mirage de la dĂ©fiscalisation au mĂ©pris de la rentabilitĂ© rĂ©elle.
Reste quâon peut se poser une question.
Est-ce que lâaffaire Aristophil aurait existĂ© avec une rĂ©trocommission Ă 4% ?
Ou mieux.
Est-ce que lâaffaire Aristophil aurait existĂ© dans un monde sans rĂ©trocommission ?
Vente de manuscrits: l'Ă©trange systĂšme Aristophil, JĂ©rĂŽme Dupuis, LâExpress, 7 mai 2015
Van Gogh Museum acquires letter from Van Gogh and Gauguin, Van Gogh Museum, 17 juin 2020
Pour aller plus loin : lâinterview dâEtienne Klein sur le manuscript
Einsteinâs notes on theory of relativity fetch record âŹ11.6m at auction, The Guardian, 23 novembre 2021
Napoleon letter to Josephine fetches record price, Luke Baker, Reuters, 10 aout 2007
NapolĂ©on : des lettres dâamour et un trĂŽne de reprĂ©sentation adjugĂ©s jusquâĂ 500 000 âŹ, Magazine des EnchĂšres
PV BRDE/DGCCRF
Cour d'appel d'Angers, 20 septembre 2022, RG n° 21/02359
The Aristophil Scandal: the epiloguen, Thibault Ehrengardt, Rare Book, décembre 2017
Perquisitions au Musée des Lettres et manuscrits, siÚge de la société Aristophil, Le Journal des Arts, 26 novembre 2014
Les lettres et manuscrits : un micro-marchĂ© dĂ©veloppĂ© par Aristophil, LâAgefi, 19 octobre 2012
Affaire Aristophil : un courtier condamné pour défaut de conseil, Rafaël Rivais, Le Monde, 13 mai 2019
TJ de Privas, 1Ăšre chambre, 30 novembre 2020
Cour d'appel de Nßmes, 1Úre chambre, 6 mai 2021, n° 19/02451
Cour d'appel de Nßmes RG n° 20/03273
Cour d'appel de Riom, Chambre commerciale, 15 mai 2024, n° 23/00269
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 26 mars 2025, 23-18.048, Inédit
Cour d'appel de Bordeaux, 1re chambre civile, 1er avril 2025, n° 22/04615
Pour avoir plus loin : Le rouleau du Marquis de Sade : restauration dâun monument littĂ©raire, BNF
Les manuscrits rĂ©digĂ©s par le GĂ©nĂ©ral de Gaulle entre dĂ©cembre 1940 et dĂ©cembre 1942 sont des archives publiques, Conseil dâEtat, 13 avril 2018
Dans les coulisses dâAristophil: Fouquetâs, Jets privĂ©s et ISF⊠Les argumentaires dâAristophil, Hughues, Bibliophilie, 17 septembre 2015
L'incroyable histoire du "Madoff" français, JĂ©rĂŽme Dupuis et Laurent LĂ©ger, LâExpress, 3 novembre 2018
Le patrimoine Ă©crit est-il un business ?, Remi Mathis, A la toison dâor, 5 octobre 2009
Descente de police au musée des Lettres et Manuscrits, Mélanie Delattre, Christophe Labbé et Laure Rougevin-Baville, Le Point, 18 novembre 2014
Le patron d'Aristophil proposait d'investir dans des manuscrits, RTBF, 5 mars 2015
Aristophil : la cour dâappel de Paris valide quelque 100 millions dâeuros de saisies, FranceTransactions, 29 fĂ©vrier 2016
LâenquĂȘte sera longue, UFC Que Choisir, 10 fĂ©vrier 2015
Aristophil: French art world rocked by suspected âPonziâ scheme, Squire Patton Boggs, Lexology, 23 juillet 2015
Aristophil mis en liquidation judiciaire, Vincent Noce, Le Journal des Arts, 6 aout 2015
Lâaffaire ARISTOPHIL : chronologie dâun dossier hors-normes !, EDC
Escroquerie : les victimes attaquent le notaire dâAristophil, Pascal Salciarini, LâEst RĂ©publicain, 21 mars 2017
Papyrus, livres d'heures et incunables : l'ultime vente Aristophil, Actualitté, 19 septembre 2022
Cotes NAF 29034-29037
PrĂšs de 170 millions dâeuros pour un Français, Le Journal de Soane et Loire, 14 novembre 2021
SAN-2018-15 - Décision de la Commission des sanctions du 13 novembre 2018 à l'égard de la société Signatures (anciennement ARTECOSA) et de M. A...B...
Nancy : Aristophil lui a volĂ© lâargent des Ă©tudes de sa fille, Pascal Salciarini, LâEst RĂ©publicain, 24 avril 2016
Les non indépendants







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